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Géorgie. La police se livre à des violations choquantes des droits humains dans le cadre de la répression des manifestations

En Géorgie, des centaines de manifestant·e·s ont été victimes de méthodes de dispersion violentes, de détentions arbitraires, d’actes de torture et de mauvais traitements dans le cadre de la répression des rassemblements antigouvernementaux au cours des deux dernières semaines, a déclaré Amnesty International le 13 décembre 2024.

Son rapport approfondi, fondé sur les témoignages de victimes de brutalités policières et de défenseur·e·s des droits humains, ainsi que sur des vidéos, met en évidence le fait que les autorités bafouent les droits humains, notamment en recourant illégalement à la force, à la torture et aux mauvais traitements, et en ciblant délibérément les journalistes. Les conclusions d’Amnesty International font état d’une répression cautionnée par l’État visant à réduire au silence la dissidence.

La répression s’est intensifiée depuis le début du mouvement largement pacifique le 29 novembre et est devenue quasi quotidienne, les manifestant·e·s continuant à descendre dans la rue. Plus de 460 personnes ont été arrêtées jusqu’à présent, et environ 300 ont signalé avoir été rouées de coups et avoir subi des mauvais traitements.

« Le monde a pu avoir connaissance de la réponse brutale de la police géorgienne face aux manifestations en grande partie grâce au travail de journalistes bravant le danger. Cependant, les violences qui se produisent à l’abri des regards sont bien plus brutales – et moins visibles : du fait de la torture généralisée et des mauvais traitements, des dizaines de manifestant·e·s en détention ont eu des os cassés, des fractures et des commotions cérébrales. Les autorités ciblent également les manifestants en procédant à des arrestations, en allant les chercher un à un dans la rue ou chez eux, a déclaré Deprose Muchena, directeur général d’Amnesty International.

Les violences qui se produisent à l’abri des regards sont bien plus brutales – et moins visibles : du fait de la torture généralisée et des mauvais traitements, des dizaines de manifestant·e·s en détention ont eu des os cassés, des fractures et des commotions cérébrales

Deprose Muchena, directeur général d’Amnesty International

« Ce cycle d’injustice se prolonge devant les tribunaux, qui ont infligé de très lourdes amendes et des peines privatives de liberté à plus d’une centaine de manifestant·e·s détenus arbitrairement. Il faut en finir avec l’impunité des crimes commis par la police et libérer sur-le-champ toutes les personnes détenues arbitrairement pour avoir manifesté sans violence. »

À plusieurs reprises, les forces de l’ordre ont fait usage de la force illégale, notamment en utilisant des gaz lacrymogènes, des balles en caoutchouc et des canons à eau qui auraient tiré un mélange d’eau et de substances chimiques. Cette réponse musclée a exacerbé les tensions, ce qui a débouché sur quelques actes de violence isolés, principalement en réponse aux tactiques d’escalade employées par la police. Plus de 100 manifestant·e·s ont été grièvement blessés, fractures et commotions cérébrales notamment, et les journalistes ont été pris pour cibles : plus de 50 d’entre eux auraient été blessés.

Amnesty International a examiné de nombreux cas de torture et de mauvais traitements, dont plusieurs ont également révélé le caractère organisé et systémique de ces violences, notamment les aveux obtenus sous la contrainte et le refus de soins médicaux en temps voulu.

« Toutes les personnes […qui ont été emmenées] au département de la police étaient couvertes de sang. Sept ou huit se trouvaient dans un état grave ; un homme avait le bras fracturé et son visage était tellement enflé qu’il ne pouvait pas ouvrir les yeux […] Les policiers nous ont remis des protocoles pré-rédigés et nous ont dit que les choses deviendraient ” compliquées ” si nous refusions de les signer », a expliqué à Amnesty International Gela Megrelidze, photographe arrêté le 1er décembre.

Lazare Maglakelidze, détenu le 2 décembre, a eu le nez cassé, une commotion cérébrale et de graves blessures à la tête ; il aurait été battu par plusieurs policiers en détention. Il a déclaré à Amnesty International : « [La police] dispose de ces fourgonnettes, dont l’intérieur a été vidé et calfeutré, et qui sont utilisées pour torturer les manifestant·e·s. Tout le monde, environ 50 à 100 policiers, a participé, on pouvait les entendre crier ” la fête va commencer maintenant ” en nous amenant jusqu’au fourgon. Tous ceux qui circulent se sentent libres de vous agresser, de vous frapper, de vous dénigrer selon leur bon gré. »

Tous ceux qui circulent se sentent libres de vous agresser, de vous frapper, de vous dénigrer selon leur bon gré

Lazare Maglakelidze, manifestant géorgien détenu le 2 décembre

Un cas terrible est celui de Davit Abuladze : ce manifestant sourd a été arrêté par la police le 3 décembre, non pas au moment de la manifestation elle-même, mais plus tard, alors qu’il allait chercher de quoi manger et quittait la zone située à une certaine distance du lieu des rassemblements. Il aurait été battu dans la rue et dans une voiture de police avant d’être détenu pendant plusieurs heures sans assistance médicale ni interprétation. Davit a dû être hospitalisé pour des blessures graves, notamment un traumatisme crânien et une commotion cérébrale.

Depuis le 4 décembre, les actes d’intimidation et les violences à l’égard des manifestant·e·s ne sont pas seulement le fait des forces de l’ordre, mais aussi d’individus non identifiés, masqués et armés. Ces hommes, apparemment affiliés aux autorités, ont intimidé et agressé des manifestant·e·s et des journalistes avec la complicité manifeste de la police dans plusieurs cas.

Bien que des centaines de cas de brutalité policière aient été signalés, aucun agent des forces de l’ordre ou membre d’un groupe armé et masqué n’a été identifié ni tenu de répondre de ses actes. Devant les tribunaux, les témoignages des policiers priment systématiquement sur les preuves vidéo et les récits des témoins, ce qui porte atteinte aux droits à un procès équitable et perpétue l’impunité cautionnée par l’État.

Amnesty International appelle les autorités géorgiennes à mettre fin à la répression, à rendre justice aux victimes et à garantir le droit de manifester pacifiquement. La communauté internationale doit se montrer solidaire afin que le gouvernement respecte ses engagements en matière de droits humains.

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